« Le 1er septembre, six ouvriers de l’usine CONTINENTAL de Clairoix ont été condamnés à des peines de 3 à 5 mois d’emprisonnement avec sursis par le tribunal correctionnel de Compiègne pour « destructions de biens d’utilité publique en réunion ».
En avril dernier, apprenant que la fermeture de leur usine était confirmée par la justice, 200 salariés menacés de licenciement avaient exprimé leur désarroi dans les locaux de la sous-préfecture de Compiègne.
Tout le monde se souvient des images de cette colère spontanée qui a conduit à la dégradation de quelques biens mobiliers. Plutôt que de prendre conscience de l’intensité de la détresse de ces salariés, le Premier ministre n’avait pas hésité à stigmatiser outrancièrement cette action en indiquant qu’elle était le fait d’une « minorité très agissante et très violente » qu’il convenait de sanctionner sévèrement.
Le gouvernement nous avait pourtant habitués à une réelle mansuétude, tant pour les « patrons voyous » - en dépit de quelques effets de manche médiatiques - que pour les auteurs de véritables saccages appartenant il est vrai à son électorat traditionnel…
Cette indignation à géométrie variable de la majorité au pouvoir est réellement insupportable, en ce qu’elle alimente la séparation sociale et la désespérance populaire.
Il est vrai que les idéologues de la « loi du marché » sont naturellement peu sensibles à l’insécurité salariale et à ses effets dévastateurs.
Une fois de plus, cette approche dominante des rapports sociaux n’a pas manqué de se traduire par une instrumentalisation consentie de la justice. Comment analyser autrement le contenu surprenant des réquisitions du parquet suggérant de punir plus sévèrement les prévenus qui contestaient leur participation aux faits ? De même, comment ne pas s’étonner de condamnations si sévères, prononcées par un juge unique n’ayant pas cru devoir - malgré la complexité de l’affaire et l’importance des enjeux - partager la réflexion judiciaire dans le cadre d’une collégialité ? Tout se passe comme si cette juridiction solitaire, en parfaite harmonie avec l’air du temps, avait anticipé le vote imminent de la loi Estrosi sur les bandes (résurgence aggravée de la loi anti-casseurs) qui prévoit rien moins qu’une responsabilité collective en matière pénale.
Le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France et la Ligue des droits de l’Homme dénoncent ce nouvel épisode de la pénalisation du mouvement social et partagent l’émoi des organisations syndicales et politiques qui ont marqué leur solidarité avec « les CONTI ».
(Communiqué commun LDH, Syndicat des avocats de France (Saf) Syndicat de la magistrature (SM))
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