Vanina Gasly.©JCH |
Vanina Gasly, archiviste en chef du service des archives de l’agglomération Seine-Eure (et de la ville de Louviers) était l’invitée, ce samedi, de la Société d’études diverses. Claude Cornu et Jean-Pierre Binay lui avaient proposé de « plancher » sur un sujet méconnu mais bigrement passionnant : la participation d’industriels de l’arrondissement de Louviers (cinq cantons) aux expositions nationales ou universelles. La conférencière a agrémenté son propos de graphiques, statistiques, images, plans, supports d’un discours emportant l’adhésion et satisfaisant la curiosité du public venu nombreux dans la salle Pierre Mendès France. Que sait, en effet, l’homme de la rue ou le Lovérien d’aujourd’hui, de l’histoire du monde du travail et notamment, de la participation des industriels originaires de Louviers et de sa région aux expositions nationales ou universelles où l’utopie géniale, pour reprendre le mot de Pascal Ory, a marqué la seconde moitié du 19e siècle et le début du 20ème.
Si les noms de Breton, Frontin, Jeuffrain, Audresset, Ternaux, Mercier etc. sont connus aujourd’hui encore, c’est parce que les élus de notre ville, au fil des décennies, ont choisi d’honorer ces industriels et manufacturiers en donnant leurs noms à certaines rues de Louviers, eux qui avaient porté haut le drapeau d’une cité réputée pour son drap et sa filière textile. Vanina Gasly conduit son auditoire dans le monde passionnant des brevets, des inventions, des progrès techniques démontrant un esprit d’entreprise et de modernisme récompensé par des prix éminents. Ces hommes (l’industrie n’était pas un monde de femmes), presque tous Lovériens, n’ont pas été les seuls de l’arrondissement (jusqu’en 1926 année de la suppression de la sous-préfecture) a être primés mais s’ils dominent dans les palmarès et les récompenses c’est sans doute parce que l’Etat, le Département et les communes avaient face à eux, des industriels dotés de moyens financiers conséquents aptes à les conduire (avec leurs machines et matériels) à Paris ou à Londres notamment. Il aura fallu le traité de libre échange entre la Grande-Bretagne et la France en 1862 (sous l’empire de Napoléon III) pour que plusieurs de ces hommes décident de ne plus traverser la Manche de peur d’être plagiés, espionnés plutôt, comme ils l’avaient été quelques années plus tôt (1). Mais d’autres expositions eurent lieu à Paris notamment, avec un nombre de visiteurs dépassant parfois 50 millions !
Vanina Gasly n’a pas omis le fait que les machines ne sont rien sans des professionnels compétents pour les faire marcher et parfois pour en améliorer le rendement. Elle a consacré un moment important de son exposé aux ouvriers amenés à côtoyer des employés d’autres pays que la France. Ainsi, certains découvrent des méthodes différentes, un droit nouveau régissant le travail et j’ai retenu ce passage (toujours vrai) où un travailleur explique dans un de ses rapports que le progrès technique peut être générateur de chômage et de suppressions d’emplois « et qu’il faut donc agir contre ! » Ce même travailleur découvre aussi la nécessité de se rassembler pour défendre des droits encore balbutiants au sein de syndicats…dont le rôle au fil des années s’est affirmé pour devenir des interlocuteurs reconnus de l’Etat et des patrons.
(1) Le site de l’INPI, l’institut national de la propriété intellectuelle, a servi de support essentiel aux recherches de la conférencière. Il est le temple de l’innovation.
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