16 décembre 2020

« L’eau est, bien plus qu’une ressource, un bien commun vital pour l’humanité et l’ensemble du vivant. » La CASE en délibère ce jeudi soir

Avoir le choix entre Véolia et Suez, c’est comme avoir le choix entre Ariel et skip. L’étiquette change mais le contenu est le même. C’est ce choix théorique que vont devoir affronter les élu(e)s de la Communauté d’agglomération Seine-Eure, du moins ceux et celles qui ne sont pas encore convaincu(e)s qu’un retour en régie publique est non seulement important du point de vue économique mais aussi et surtout du point de vue écologique et social.

 

Dans plusieurs pays de la planète, la guerre de l’eau fait déjà rage. En Australie, aux Etats-Unis, des fonds vautours s’attaquent aux marchés de l’eau en achetant des milliers d’hectares dont le sous sol-baigne dans d’importantes nappes phréatiques. De nombreux éleveurs et agriculteurs ont été contraints de vendre leur bétail ou leurs terres eu égard aux prix faramineux qu’exigeaient d’eux les grandes sociétés pour les alimenter en eau. Le résultat ne s’est pas fait attendre : on a assisté — dans des pays où le changement climatique est à l’œuvre sous forme de sécheresses récurrentes — à des concentrations de biens dans quelques mains fortunées laissant sur la paille des générations d'agriculteurs et d'éleveurs incapables de payer les prix exigés d’elles.

 

On n’en est pas encore là en France. Pourquoi ? Parce que des élus dont c’est la compétence ont fait de l’eau un bien public à protéger des intentions pas toujours bienveillantes des grands groupes dont la France s’enorgueillit surtout à l'étranger. Mais avec le temps, les concentrations-absorptions ont réduit le choix comme peau de chagrin. On assiste même aujourd’hui à la volonté capitalistique de Véolia à l’égard de Suez dont les dirigeants en sont réduits à acheter des pages de publicité dans les grands journaux français pour dénoncer la volonté hégémonique d’un groupe qui s’occupe de tout : l’eau, l’assainissement, le transport et l’élimination des déchets, les transports urbains…

 

Pourquoi les élus de la CASE seraient-ils moins avertis que ceux de la majorité de la métropole du Grand Lyon qui viennent de mettre fin au contrat la liant à Véolia à partir de 2023. Déjà, Gérard Colomb, pourtant farouche défenseur de la délégation de services publics, par rapport au précédent contrat, avait obtenu en 2015 des améliorations : une durée de huit ans seulement, un prix de l’eau en baisse de 20%, l’obligation de réduire les fuites sur le réseau et de créer une société à part – Eau du Grand Lyon – pour gérer ce marché, afin de faciliter les contrôles. Ce contrat, officiellement démarré le 3 février 2015, arrivera à échéance à la fin 2022 et la majorité de gauche a décidé le retour en régie publique lundi dernier. Il est reproché à Véolia des « marges du délégataire » excessives, même si pour un contrat à 91 millions d’euros par an, la rentabilité annuelle pour le délégataire a bien diminué, passant à 6,5% en moyenne de 2015 à 2019. Autant d’argent que l’exécutif de la Métropole veut réinvestir pour améliorer le rendement du réseau.

 

La vice-présidente en charge de l’eau, Anne Grosperrin, a développé un autre avantage de la régie par rapport à une délégation de service public : « la participation des usagers à la définition des politiques publiques relatives à la gestion de l’eau ». D’où le choix d’un passage en régie avec autonomie financière et personnalité morale qui permettra de faire participer des associations d’usagers et des représentants du personnel au conseil d’administration de la régie. On le voit, qu’il s’agisse de Nice, Grenoble, Bordeaux, Paris, Lyon, des majorités de toutes les couleurs défendent la régie publique et elles ne manquent pas d'arguments.

 

Ce jeudi, les élus de la CASE sont invités par l’exécutif que préside Bernard Leroy, à anticiper une délégation de services publics pour l’eau à compter du 1er janvier 2022. Le président de l’agglomération s’appuie sur une expertise succincte émanant de cabinets conseils dont Marc-Antoine Jamet assure que leurs conclusions sont faites pour aller dans le sens attendu par le donneur d’ordres. Vous voulez une DSP : vous l’avez !

 

Il se trouve que des élus et des usagers sont engagés depuis longtemps sur notre territoire pour défendre le principe d’une régie publique de l’eau même avec des variantes. Ce qu’ils demandent : une temps suffisant pour étudier sérieusement un dossier qui va engager l’avenir pour plusieurs années. Obtiendront-ils un report du vote décisionnel ? Ce sera l’enjeu de la réunion de ce jeudi soir 17 septembre. Comme rien ne presse, il serait démocratique que ce report soit adopté. Un travail de réflexion considérable a été mené avec des élus de diverses communes engagées dans la régie publique. Pour en mesurer les bienfaits, il y faut, tout simplement, du courage politique et une vision à long terme, l’eau devenant au fil du temps un bien de plus en plus rare et donc de plus en plus précieux.

 

Les débats de la CASE seront retransmis sur Internet jeudi soir puisque le public ne sera pas admis dans la salle Jesse Owens de Val-de-Reuil (protocole sanitaire) où se tiendra la réunion des élus de la CASE. Soyons nombreux à les suivre.

 

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