PMF et le général De Gaulle à Louviers. |
Quelle bonne idée d’avoir
fait éditer les « Ecrits de résistance » de Pierre Mendès France. On y découvre
plusieurs visages du grand homme. Le combattant rageur, courageux, animé d’une
forme d’héroïsme nécessaire, le mari dont l’épouse et les enfants ne sont plus
vus depuis plusieurs années, le politique, le « parlementaire » insatiable
imaginant la France des années d’après-guerre. Les mois passés au sein du
groupe Lorraine, les bombardements effectués sur la France afin de limiter les
effets et la durée de la présence allemande ont permis à Pierre Mendès France
de retrouver son honneur et sa dignité bafoués par le jugement inique de la
justice de Vichy. « Français libre » — comme Romain Gary — PMF sous l’uniforme
a retrouvé l’estime de lui-même et la confiance du général De Gaulle, lequel l’a
d’ailleurs contraint de le suivre à Alger pour entrer au sein du gouvernement
provisoire de la République.
Pour évoquer ces « Ecrits de
Résistance », Vincent Duclert, de la Fondation Jean Jaurès avait invité en ce
18 juin — une date précieuse — les petits fils ou fils d’hommes de la France
Libre mus par une émotion palpable et des historien(ne)s dont les propos brefs
mais ciselés vous projettent dans le monde intellectuel sensible.
Michel Crémieux, Jean-Pierre
Worms et Miguel Brossolette Franco se sont souvenus de leur jeunesse, quand
parents et grands-parents narraient les récits et les actions de leurs fils
dont la vie ne tenait qu’à un fil. Pierre Brossolette se défenestra pour échapper
à la gestapo et ses tortures, Jean Worms fut pendu par les Nazis à Flossenburg
comme agent des services secrets britanniques, seul Jean-Louis Crémieux-Brilhac
put rentrer en France sain et sauf à la Libération, son seul regret étant de ne
pas avoir participé les armes à la main au rétablissement de la République et
de l’indépendance de la France.
Miguel Brossolette Franco, JP. Worms, Michel Crémieux et Vincent Duclert (de g à dr).©Jean-charles Houel |
Les trois historiens invités :
Anne Simonin, Stéphane Audoin-Rouzeau et Alain Chatriot, tous professeur(e)s éminents,
au CNRS, à Sciences Po Paris ou encore à l’Ecole des Hautes études en sciences
sociales. Chacun(e) dans leur style aussi subtil que documenté ont commenté ces
écrits de résistance. Ce qui domine : l’urgence ! L’urgence de
combattre, l’urgence de vivre et de survivre, l’urgence de témoigner, pour
soi-même et pour les autres. Leur découverte du personnage Mendès France,
notamment avec ses carnets de guerre, les a surpris. Cet homme, droit comme un
I, eut même l’obsession morale de réduire à néant (en attendant le jugement de
cassation qui le maintint comme déserteur !) par le droit, pour le droit,
cette atteinte à sa personne qu’il considérait comme un tout : patriote,
juif, franc-maçon, homme de gauche, de progrès, parlementaire, aimé des Lovériens
(qui le trahirent pourtant en 1958) dont la ville fut presque survolée par le
groupe Lorraine…Il faut lire cette page dans laquelle le navigateur PMF, à bord
de son bombardier, suggère « sa maison des Monts, ses arbres, son jardin » qu’il
pourrait presqu’apercevoir.
Je vous invite, toutes
affaires cessantes à vous procurer ces « Ecrits de résistance ». Ils font
honneur à l’homme PMF dans toute sa complexité, ses contradictions mais aussi
sa sublime solitude quand il lui faudra, plus tard, par exemple affronter des
adversaires résolus, souvent antisémites, et qu’il se séparera du général De
Gaulle qu’il avait pourtant tant admiré. Pour lui le 13 mai 1958 était un sale
coup. Un coup d’Etat.
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