La sagesse l’a emporté. Les éditions
Gallimard ont en effet décidé, ce jour, de différer la publication des trois
textes de Céline (dont Bagatelles pour un massacre) faute de pouvoir éclairer
historiquement les pamphlets antisémites de l’écrivain français. Si ces trois
textes ont été édités au Québec, en 2012, annotés par un « spécialiste » universitaire
de l’œuvre de Céline, les éditions Gallimard ont pensé qu’il pouvait en aller
de même en France…
Dès que l’annonce de cette
publication a été faite, nombre de voix se sont élevées pour protester,
certaines demandant l’interdiction pure et simple de ces textes dont la lecture
est permise et qui circulent d’ailleurs sur Internet. Le débat est toujours de
même nature : il faut distinguer l’homme Céline de l’écrivain Céline, celui
du « Voyage au bout de la nuit. » Comme il fallait distinguer le Pétain de
14-18 du Pétain de 1940. Comme il faudrait distinguer le réalisateur Roman
Polanski du « violeur » qu’il fut à une autre époque de sa vie. Peut-on distinguer l'homme de son œuvre ? Tout homme n'est-il pas entièrement dans ce qu'il dit, fait, écrit ?
Ces débats sont vifs, inépuisables
car chaque camp veut toujours avoir raison sur l'autre. Pour que les éditions Gallimard adoptent
cette attitude de retrait, c’est bien parce que la publication de textes sulfureux,
abominables, scandaleux, mérite d’être entourée d’un luxe de précautions
permettant aux jeunes générations de découvrir, s’ils ne le connaissent déjà,
le contexte de l’époque de l’entre deux guerres et surtout d’avoir accès à des
critiques étayées sur les mensonges, les jugements infondés, les attaques
virulentes de l’écrivain antisémite.
En republiant « Mein Kampf »
les Allemands ont exigé une édition critique offrant toutes les garanties de sérieux,
d’objectivité factuelle, permettant de démontrer et de démonter les fantasmes destructeurs du
dictateur nazi. Tant que les éditions Gallimard n’auront pas trouvé les historiens,
les chercheurs, les philosophes à même de créer des pare-feux indispensables
aux lecteurs contemporains, avouons qu’elles ont eu raison de refuser un travail
bâclé et donc inadmissible.
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