11 mars 2017

Caricature antisémite : Accoyer présente ses excuses mais le mal est fait


Bernard Accoyer, secrétaire général du parti Les Républicains, a présenté ses excuses au nom de son parti. C’est bien le moins qu’il pouvait faire après la publication de la caricature, hier, pendant plusieurs heures, sur le site de son parti. Nous n’avons pas encore entendu François Fillon mais j’imagine qu’il a d’autres chats à fouetter que de s’inquiéter de l’image d'un parti…à la dérive.

Car l’émotion a été grande après la publication de cette caricature rappelant, comme l’a bien dit Alexis Corbière, de la France Insoumise, les années 30. C’était l’époque où les membres des ligues fascistes et des journaux d’extrême droite demandaient la mort pour Léon Blum et préparaient la grande manifestation du 6 février 1934, jour choisi pour renverser la République et mettre à bas la gueuse, le «système» républicain. Déjà, le système !

La violence verbale et physique était partout. Les insultes succédaient aux injures et il fallait être solide, bien charpenté, pour faire preuve d’engagement à gauche au service de la démocratie. Ces journées de février 1934 montraient le vrai visage d’une extrême droite rejointe par la droite extrême. En sommes-nous là aujourd’hui ? La question mérite d’être posée quand on lit que 38 % des électeurs de François Fillon ont l’intention, s’il n’est pas qualifié pour le second tour, d’apporter leurs suffrages à Marine Le Pen. La barrière morale, éthique, idéologique qu’incarnent les vrais gaullistes ou encore Chirac et Juppé, est en train de céder.

Notre république est donc à un tournant de son histoire. Trump et Farage (aux USA et en Grande-Bretagne) apportent la preuve que les mensonges quotidiens et les attaques contre les journalistes (1) sont susceptibles de faire une majorité. Le fascisme rampant a toujours existé en France. Il n’y a qu’à lire Paxton et mieux connaître notre passé. Certes et « même si le ventre est toujours fécond d’où a surgi la bête immonde » (2) il se trouvera toujours des millions de Français, de droite et de gauche, surtout, pour résister et combattre des idées nauséeuses. Finalement, la publication de cette caricature a le mérite de mettre au jour des sentiments que généralement, on a honte d’afficher publiquement. La LICRA (3) prépare une charte éthique et politique qu’elle va soumettre aux candidats à l’élection présidentielle. On verra qui la signe et surtout qui refuse de l’approuver.

(1)  « journalopes » « médiocrates » sont les insultes répétées dans les meetings de François Fillon dont les frasques et les turpitudes sont narrées dans toute la presse.
(2) Citation de Bertold Brecht.
(3)  La Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme.

10 mars 2017

« Chambres à gaz et nez crochu » : des adversaires d'Emmanuel Macron se surpassent dans l'abject


Les Républicains (LR) portent très mal leur nom. La preuve ? Une caricature (voir ci-dessous) publiée sur leur site représentant Emmanuel Macron en haut de forme avec faucille et cigare dans la main, le nez crochu, entouré des portraits de ceux et celles qui le soutiennent. Et cela le jour même où Vincent Peillon, ancien ministre de Gauche, s’est permis une allusion infecte en comparant le mouvement « en Marche »…et l’UMPS…et Marine Le Pen…et les chambres à gaz. Il serait souhaitable que l’ancien candidat à la primaire socialiste explicite son propos et clarifie cette association d’idées dont on ne comprend ni le contexte ni la finalité. A moins que cette saillie ait été motivée par quelque dérapage inconscient, de toute façon coupable de la part d’un homme politique que, jusqu’aujourd’hui, j’estimais.

Des Républicains…bien peu républicains.
Quant aux fameux républicains, face au tollé et aux remarques nombreuses des internautes, ils se sont résolus à modifier leur caricature en supprimant l’objet du délit (l’antisémitisme étant évident) et en remplaçant l’homme au cigare par une photo d’Emmanuel Macron. Évidemment, l’effet n’est pas aussi explosif qu’espéré avec le premier mouvement. Tout de même, qu’une idée pareille ait germé dans un esprit forcément collectif ne laisse pas d’inquiéter sur la réalité des hommes (et peut-être des femmes) qui entourent François Fillon.

Il est déplorable de constater que les Républicains d’un côté et Vincent Peillon de l’autre (j’ose espérer que Benoît Hamon ne cautionne pas les propos de ce dernier) face aux sondages négatifs et permanents — mais rien n’est définitif et une campagne sert à éclairer l’opinion publique voire à modifier ses points de vue — se livrent à des bassesses quelque peu surprenantes dans une période dont ils ne maîtrisent plus le tempo. Les animateurs du mouvement « En marche » crient au scandale et ils ont raison. Le programme d’Emmanuel Macron peut et doit être critiqué, ausculté, discuté. Nul besoin de chambres à gaz ni de nez crochu de sinistre mémoire. 

9 mars 2017

Les centristes ne savent plus où donner de la tête


Ah ces centristes, ils sont extraordinaires. Le prototype de cette branche politicienne me paraît être ce M. Lagarde qui préside l’UDI, parti auquel appartient le maire de Louviers, François-Xavier Priollaud. Il pourrait dire comme Jules Renard : « une fois que ma décision est prise, j'hésite longuement. » Pendant des jours et des jours, M. Lagarde exhorte le parti LR à changer son candidat à la présidentielle tant il est frappé d’indignité et propose pour le remplacer tantôt Alain Juppé, tantôt jean-Louis Borloo. Mais les faits sont têtus et Fillon résiste à la tempête. Chez les Républicains, après un week-end calamiteux au cours duquel a été dit tout et son contraire, quand Sarkozy fixait ses conditions à la candidature de Juppé tout en soutenant Fillon en sous-main, Gérard Larcher a finalement sifflé la fin de la récréation en déclarant : « l’incident est clos, tous derrière Fillon ! » Lequel les avait tous roulés dans la farine car le fils du notaire de Sablé avait plus d’un tour dans son sac.

Jean-Christophe Lagarde est le prototype des centristes.
Face à cette adversité — étant entendu que M. Lagarde a annoncé la défaite assurée avec Fillon — qu’a dit le conseil national de l’UDI, réuni l’autre soir à Paris pour trancher : « l’accord pour la législatives entre l’UDI et LR tient toujours ». Ils sont prudents ces centristes surtout pour conserver quelques circonscriptions. Quant à la présidentielle ils sont impatients de lire les nouvelles propositions de Fillon !  Autrement dit, il est urgent d’attendre. En fait, l’UDI va demeurer en retrait de la campagne avec des initiatives individuelles locales variables et attendre le soir du premier tour de la présidentielle pour se positionner en faveur du candidat qui affrontera « la Poison » (1), je veux dire Marine Le Pen si les sondages se confirment.

L’UDI ne sera pas la seule à patienter puisque nombre de socialistes sont dans le même cas. Les ultimes sondages de la campagne permettront aux uns et aux autres de se déterminer non pas tant par rapport à un projet mais surtout par rapport à celui ayant le plus de chances de battre Marine Le Pen. Bertrand Delanöé, ancien maire de Paris, s’est déclaré, dès hier, en faveur d’Emmanuel Macron, le programme de Benoît Hamon ne lui convenant pas. Il a le mérite de la franchise et de se déterminer clairement. Lui ne volera pas au secours de la victoire. Quand on dresse le bilan de ces derniers jours, qui peut avoir envie de soutenir François Fillon un candidat dont la principale qualité semble bien être l’entêtement et l’aveuglement de la passion sinon le noyau dur de plus en plus rabougri.

 (1) L’expression n’est pas de moi mais de Karl Zéro hier matin sur France Info.

8 mars 2017

François Fillon candidat des sans-culottes ! Quel culot ! (1)


François Fillon dit s’appuyer « sur la France des châteaux, des cathédrales et des sans culottes ». Des cathédrales, sûrement puisque la cathosphère et Sens commun (1) ont assuré le relatif succès populaire de la manifestation du Trocadéro. Des châteaux, sans nul doute puisque lui et son épouse Pénélope en possèdent un à Sablé dans la Sarthe. Des sans culottes, je n’en suis pas du tout certain. Il suffit d’analyser, comme l’ont fait les observateurs présents à Paris dimanche, la sociologie des manifestants (qui n’étaient pas 200 000 comme la crié Bruno Retailleau mais 50 000 ce qui est déjà bien). Les «pèlerins» soutenaient le futur mis en examen ( ?) en famille, portaient loden vert et jupe écossaise sans oublier la casquette plate indispensable sous la pluie battante…

Capture d'écran.
Les sans culottes, du nom des révolutionnaires de 1789 dont se réclame le candidat de la droite dure, étaient évidemment absents. Le peuple de France avait autre chose à faire que d’aller soutenir celui qui porte atteinte à l’état providence et propose un programme économique et social bâti sur du sang et des larmes. Et alors même que son épouse et ses enfants ont eu accès au confort matériel des privilèges que l’on sait. Invoquer les mânes des sans-culottes…quel culot !
Fillon ne gagnera pas la présidentielle. Obtus autant qu’obstiné, il gère au mieux ses parrainages, bénéficie de l’argent de la primaire et de la pusillanimité de ses adversaires de l’intérieur. Certains avaient quitté la scène, ils reviennent ! D’autres moins courageux ou plus lâches, se tiennent en réserve. D’autres iront rejoindre Emmanuel Macron, réceptacle de toutes les rancœurs et agrégat d’une folle espérance. François Fillon « le séguiniste » devient donc l’avatar d’une droite intégriste, à mille lieues de la droite sociale à laquelle il appartint jadis. Ce n’est pas le prêt de 50 000 euros non déclaré à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (2) qui va améliorer son image d’homme probe et intègre. Un pavé de plus dans la mare aux affaires ! 

(1) article à paraître Dans La Dépêche du 9 mars 2017
(2) Sens commun, association à l’origine de la « Manif pour tous » contre le mariage de personnes du même sexe.

6 mars 2017

Le travail de Pénélope Fillon auprès de M. Joulaud n'était que « paroles verbales » (1)


(capture d'écran).
Dans le JDD d’hier, Pénélope Fillon est longuement interviewée par deux journalistes. Le plus intéressant n’est pas tant les réponses qu’elle donne que la publication deux pages plus loin d’extraits des procès verbaux des interrogatoires des époux Fillon par les policiers de la police judiciaire. Je ne prendrai qu’un exemple du travail « effectif »…effectué par Pénélope Fillon auprès de l’ancien suppléant de son mari devenu député quand celui-là a été nommé premier ministre de Nicolas Sarkozy.

Pénélope Fillon, au service de M. Joulaud, ancien suppléant donc de François Fillon, payée jusqu’à 10 000 euros par mois, n’avait qu’une action « orale » affirme-t-elle. Celle de le relier du Palais Bourbon (à Paris) à la circonscription de la Sarthe ! Une action orale ! Etonnons-nous, dès lors, que la réalité du travail accompli ne puisse être apportée ou concrétisée puisqu’il ne s’agissait que de « paroles verbales » comme disent les hommes politiques. Qui peut, dès lors, croire sérieusement que ce travail n’était pas fictif ? Qui peut croire qu’un travail « oral » peut convaincre le parquet et les juges d’instruction de la réalité d’une collaboration concrète et réelle ? François Fillon a beau clamer partout que sa femme a travaillé à la discrétion de son employeur « et que personne d’autre que ce dernier n’a à contrôler le contenu de ce travail » il sera certainement obligé de trouver un autre angle de défense s’il veut convaincre les juges d’instruction de sa bonne foi. 

Quant à M. Ladreit de la Charrière, de la Revue des deux mondes, s’il a embauché Mme Fillon, « c’est à la demande son mari » lequel l’a décoré de la croix d’officier de la Légion d’honneur quelques mois après, suscitant la curiosité des juges qui le soupçonnent de trafic d’influence (2) délit retenu par le parquet national financier.

De même, le toujours candidat LR à la présidence devra également répondre de « fausse déclaration de patrimoine » devant la Haute autorité pour la transparence de la vie publique qui sous-entend une sous estimation des propriétés que possède le couple Fillon. La perquisition effectuée récemment par la PJ dans le manoir-château de Sablé n’avait d’autre but que d’expertiser le bien des Fillon au prix du marché. Cet ensemble de délits aboutira sans doute à la mise en examen du couple Fillon.

Alain Juppé, ce matin, en réitérant sa volonté de ne pas être candidat à la présidence de la République, a clairement affiché son opposition aux arguments de Fillon. Le maire de Bordeaux assure que « le complot judiciaire et l’assassinat politique » n’ont aucune réalité (« le prétendu complot ») et que jamais la droite ne s’est trouvée dans une situation aussi catastrophique à quelques semaines du premier tour de la présidentielle. Venant d’un ancien Premier ministre, lui-même victime d’une condamnation pour emplois fictifs (à la mairie de Paris) ces propos devraient ouvrir les yeux des militants les plus radicalisés. L’élection imperdable est devenue l’élection ingagnable.

(1) pléonasme couramment utilisé en politique.
(2) Le trafic d’influence est le fait, par quiconque, de solliciter ou d’agréer, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour lui-même ou pour autrui, pour abuser ou avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

5 mars 2017

François Fillon finira-t-il dans les poubelles de l'histoire ?


Donald Trump est un adepte de la doctrine Pasqua. Même s’il n’a jamais entendu parler de l’ancien ministre français, le nouveau président des Etats-Unis applique à la lettre une théorie dont le créateur du SAC (service d’action civique) usait et abusait. Elle est la suivante : quand vous êtes mis en cause dans une affaire, créez en une de toutes pièces afin de détourner l’attention et l’intérêt des médias.

Inquiété par les liens des membres de son entourage familial et « professionnel » avec la Russie de Vladimir Poutine, plusieurs ministres étant mis en cause, le président a décidé de s’en prendre à Barack Obama qui, selon lui, l’aurait mis sur écoute en octobre dernier. Trump n’apporte évidemment aucune preuve ni aucun élément permettant d’accréditer cette attaque. Il dit avoir découvert cette information sur le site de Breitbart News dont l’un de ses principaux conseillers est, comme par hasard, ancien éditorialiste et non des moindres puisqu’il s’agit de Steve Banon. Autrement dit, le coup monté est évident. Les conseillers de Barack Obama ont démenti cette affirmation diffamatoire mais Trump s’en tape le coquillard.

Pour lui, ce qui compte c’est d’enfumer l’opinion publique, de faire diversion, de créer le buzz autour d’une soi-disant affaire qui éloignerait les journalistes de ses actes et de ses manquements. Un magazine diffusé récemment à la télévision sur la vie de Trump expliquait très bien comme l’un de ses mentors taillait en pièces la vérité et comment il lui fallait réagir en cas de mise en cause : plutôt que de se défendre, attaquer. C’est ce que fait Trump. Certes, la ficelle est un peu grosse mais quand les hommes ou les femmes politiques décident de parler aux tripes plutôt qu’à la raison des citoyens — le propre du fascisme au demeurant — leur discours sème le doute, suscite des passions, crée un climat anxiogène favorable à la colère et surtout à la théorie du complot.

La France de 2017 est également atteinte par ce mal. Marine Le Pen refuse de se rendre chez les juges, craignant une mise en examen qui n’est que partie…remise, Fillon en appelle à la rue contre les juges « rouges » avec le soutien des fanatiques de Sens commun et de la Manif pour tous. Heureusement, nombre des parlementaires de la droite et du centre veulent sortir du guêpier. Ils ont compris que le comportement suicidaire de François Fillon allait les atteindre tous. Cet après-midi à Paris, l’ancien maire de Sablé pourra compter sur les plus extrémistes de ses supporteurs. Et alors ? L’effet Berlusconi (en souvenir de la grande manifestation de 2003) a montré ses limites et l’homme a fini sa carrière dans les poubelles de l’histoire. François Fillon veut-il l’y rejoindre ?