8 mai 2017

Emmanuel Macron domine de la tête et des épaules…surtout de la tête



Avec près de 66 % des suffrages, Emmanuel Macron a dominé des épaules et de la tête (surtout de la tête) une Marine Le Pen dont le naufrage programmatique a été acté lors du débat de mardi dernier à la télévision. Le nouveau président de la République aurait tort de croire (d’ailleurs il ne le croit pas) que cette victoire sans appel est un soutien ferme et durable à son projet. Que le vote ait manifesté au travers de sa personne et de sa volonté une forme d’adhésion est indéniable mais ce n’est pas l’essentiel de l’expression du second tour. Les Français(e)s ont surtout voulu barrer la route du pouvoir au Front national dont l’histoire, le passé, les propositions, la violence verbale ou physique, continuent de faire peur. Ce parti peut bien changer de nom, il ne pourra pas masquer ses outrances, sa démagogie et finalement sa marginalisation. Pour preuve, une fois encore, une fois de trop, l’oukase lancé contre une quinzaine d’organes de presse interdits d’accès au QG de Mme Le Pen le soir de sa défaite. J’en connais d’autres — et qui ne sont pas d’extrême-droite — dont le comportement à l’égard de la presse frise l’hystérie.

Marginalisée à 10 millions de voix c’est déjà énorme. Il suffit de lire les scores obtenus par Marine Le Pen dans les villages et les périphéries des villes pour comprendre que le « dégagisme » érigé en théorie et en pratique par Jean-Luc Mélenchon est devenu un mot d’ordre dans lequel les « oubliés » et les « désespérés » mais aussi les racistes et les homophobes trouvent du sens. Je pense aussi à tous ces rurbains qui ont voulu habiter les campagnes là où le foncier était accessible et qui, avec le temps et l’espace, constatent l’augmentation des coûts pour les transports, les allers-retours coûteux en argent et en énergie. Ils demandent plus de services, plus de services publics, ceux-là même qu’ils ont abandonnés dans leur chef-lieu de canton ! Pourtant les intercommunalités ont redonné vie et solidarité mais les discours du Front national — l’insécurité, l’immigration, la préférence nationale — ont fini par imprégner les esprits et susciter des jalousies. Mme Le Pen en a usé et abusé.

Hier soir, les émissaires des partis présents sur les plateaux de télévision nous ont offert ce qui nous dégoûte le plus dans la vie politique. Les Coppé, les Corbières (il avoue avoir voté Macron…mais après la victoire !), les Rachline, les Baroin étaient venus défendre leur boutique en vue des législatives prochaines lors de la fameuse « mère des batailles ». Ils en rêvent tous. Ils cauchemardent même. Quant à Jean-Luc Mélenchon, il aurait eu grand tort de négliger l’influence des médias que pourtant il exècre. Il a même trouvé le moyen de se satisfaire de la défaite de Marine Le Pen alors que deux tiers de ses militants et sympathisants appelaient à voter blanc ou nul et que lui-même Jean-Luc Mélenchon les a sans doute imités ! Le « monarque » républicain défenseur de « l’extrême finance » (1), s’il doit beaucoup à une majorité d’électeurs de la France insoumise, ne doit rien à Mélenchon lui-même. Il a joué avec le feu, il faudra s’en souvenir.
 
Chez les Républicains (LR) et les socialistes, malgré la qualité de certains candidats, l’inquiétude est au plus haut. Les inévitables déclamations du genre « vous allez voir ce que vous allez voir » ne vont pas empêcher les anciens partis de gouvernement de devoir ramer pour sauver les meubles en juin prochain. Le PS est coupé en trois, les Républicains (LR) en autant de portions entre ceux qui veulent rejoindre la majorité présidentielle, ceux qui veulent garder la vieille maison et ceux qui cherchent une chambre introuvable avec une majorité absolue et une cohabitation des jours anciens. Question rénovation de la vie politique, on fait mieux ! Manquerait plus que Fillon donnât son avis…

A Louviers, à Val-de-Reuil, Pont-de-l’Arche et dans les gros bourgs, Emmanuel Macron est arrivé en tête. Dans certains villages, Mme Le Pen récolte le fruit des colères et de la révolte. La France est coupée en deux et les suffrages en quatre. Il reste au jeune président à « rassembler » et à unifier ce qui peut l’être. La quadrature du cercle !

(1) L'expression et de Jean-Luc Mélenchon

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