11 octobre 2014

Il faut faire raquer les sociétés d'autoroutes qui nous rackettent

(dessin de CANARDLAPIN - Mediapart)

J’ai dénoncé, il y a quelques semaines, les bénéfices « nets » exorbitants des sociétés d’autoroutes. Depuis que Dominique de Villepin, le donneur de leçons, a eu cette très mauvaise idée de concéder les bijoux de famille de l’Etat à des sociétés privées et à un prix défiant toute concurrence, les péages n’ont cessé d’augmenter et les marges des quelques SAPN et autres ASF de croître dans des proportions gigantesques.
Il me faut répéter pour la nième fois que peu de voix se sont élevées contre ce scandale, notamment à gauche. Seul, bien seul, François Bayrou a hurlé et tenté d’empêcher cette spoliation de l’Etat et donc des Français. Mais en vain.
Et comme un malheur n’arrive jamais seul, de Villepin a négocié des conventions draconiennes faisant que toute amputation des marges — au bénéfice de l’Etat — devrait être compensée soit par une augmentation des péages soit par un allongement de la durée des concessions. Sacré Villepin…et il voudrait qu’on l’applaudisse !
Voilà pourquoi l’idée émise par Ségolène Royal me semble bonne. Puisque l’écotaxe a plus que du plomb dans l’aile et que la convention passée (encore l’UMP !) par François Fillon nous oblige à dédommager Ecomouv à hauteur de 800 millions d'euros, dit-on, la société créée pour recueillir une taxe disparue corps et biens sous la pression du lobby des transporteurs routiers (dont il serait idiot de nier les difficultés financières dans le contexte économique actuel) la ministre de l’environnement propose de taxer les sociétés autoroutières.
Elle a raison. Compte tenu des marges constatées aux bilans des dites sociétés, il n’est pas anormal, même s’il faut prolonger la concession de quelques années, de se payer sur la bête, bien gosse et bien grasse. Je ne vois pas d’autres moyens pour financer l’amélioration des infrastructures de transports ferroviaires ou routiers. Il m’arrive d’utiliser les autoroutes de notre pays, pour des raisons de sécurité notamment, et je sais ce qu’il en coûte pour un trajet même court d’une centaine de kilomètres. Si l’on excepte la Bretagne et quelques liaisons du sud de la France, le racket autoroutier rapporte une petite fortune aux actionnaires de SANEF et autres sociétés identiques.
Michel Sapin pourra toujours protester contre la proposition de sa collègue de l’environnement, j’espère qu’elle ne lâchera pas le morceau et passera, s’il le faut, par la loi pour mener au bout son projet. Une dernière suggestion : compte tenu des prix pratiqués par les concessionnaires des parkings privés, je propose à Ségolène Royal d'aller y regarder de plus près. Il doit y avoir, là aussi, du grain à moudre.

10 octobre 2014

La prochaine crise financière proviendra-t-elle de la situation financière des collectivités territoriales ?

Nicolas Mayer-Rossignol à Val-de-Reuil. (photo JCH)
Le taux de croissance de l’Allemagne sera revu à la baisse en 2014 et en 2015. Angela Merkel dit réfléchir à cette fâcheuse situation. Le fait est que les principaux clients de la première économie européenne sont ses voisins et que ceux-ci, frappés plus ou moins durement par la rigueur ou par l’austérité, comme on voudra, achètent moins de produits allemands…la balance commerciale demeure toutefois excédentaire. O combien !
S’agissant de la France, le taux de croissance envisagé par l’INSEE et le FMI ne correspond pas à celui qui a servi à établir le budget 2015. Autrement dit, les prévisions du gouvernement sont « optimistes » selon qu’on lui est favorable ou « insincères » si on l’est moins. En parlant franc cela veut dire que la consommation ne repart pas, que l’inflation est au plus bas et que le chômage va continuer d’augmenter même moins vite, comme dirait Michel Sapin.
En parlant franc, toujours, cela veut dire que les politiques conduites par des gouvernements de droite ou de gauche, construites sur la baisse des dépenses publiques, sur une déflation qui ne dit pas son nom (attendons encore quelques mois) nous mènent tout droit à l’échec. Delphine Batho (la ministre virée) aurait donc raison d’affirmer dans son livre « insoumise » que s’il est fidèle à sa parole, François Hollande ne pourra se succéder à lui-même puisqu’il aura échoué sur une de ses principales promesses : la baisse du chômage en France.
Reconnaissons qu’il n’est pas le seul responsable de la situation actuelle. L’Allemagne ne veut pas relancer l’investissement et donc favoriser une croissance susceptible d’aider ses amis européens. Jean-Claude Juncker, le nouveau président de la Commission, a beau envisager un programme de 300 milliards d’euros à engager dans des infrastructures et le numérique etc. pour l’instant on n’en voit pas la queue d’un. Christine Lagarde, présidente du FMI, a pris conscience de l'Etat économique de l'UE et pousse à des initiatives même non orthodoxes.
Faut-il pour autant augmenter les impôts ? Certainement pas. Je pense à ce qu’affirmait Nicolas Mayer-Rossignol lors d’une réunion publique tenue à Val-de-Reuil récemment : « Les gestionnaires de fonds publics doivent veiller à l’état de la dette. Elle doit être soutenable. » C’est sans doute parce qu’elle est soutenable en Haute-Normandie que cette région est considérée comme l’une des régions les mieux gérées de France. Et pourtant, la Région Haute-Normandie lance des programmes d’investissements importants en collaboration avec les départements et les intercommunalités.
Prenons garde. La prochaine crise économique pourrait bien provenir de l’état des finances des collectivités territoriales dont les dépenses fixes ne baisseront pas si aisément.

8 octobre 2014

Loi antiterroriste : le gouvernement confond précipitation et efficacité


« Demain jeudi 9 octobre, le Sénat examine le projet de loi antiterroriste. Il s'agira d'une lecture unique, puisque le gouvernement, confondant précipitation et efficacité, a décidé de la procédure d'urgence. L'Observatoire des libertés et du numérique (OLN) considère que cette décision prive la représentation nationale d'un débat normal sur les libertés publiques, dans lequel les arguments contraires auraient mérité d’être entendus.

Si la lutte contre le terrorisme est légitime, elle ne peut justifier de légiférer en urgence sous le coup de la peur et de l’émotion, et d’adopter des lois toujours plus liberticides. Les événements récents posent sans aucune contestation possible la nécessité de procéder à la poursuite, à l'arrestation et au jugement de criminels. Mais sans le respect des principes, la lutte contre le terrorisme se réduit, aux dépens de la justice et des libertés publiques, à une vengeance sans fin. Amender encore une fois l’arsenal déjà lourd de la lutte antiterroriste dans ces circonstances, c’est prendre le risque de dissoudre la délibération démocratique dans une posture événementielle. A chaque fois qu'en matière législative, on fait vite, on ne fait pas bien. Et c'est exactement le cas avec la future « loi antiterroriste », déjà votée par l’Assemblée nationale et qui va suivre la procédure d’urgence : une seule lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Une fois de plus, au lieu de procéder à une évaluation des lois existantes avant d’en promulguer une nouvelle qui pourrait tenir compte de l’expérience, ce qui tient lieu d’analyse, c’est le recours législatif immédiat et l'illusion est ainsi donnée que l'on a pris en haut lieu la mesure du danger. Aujourd’hui le combat contre le « djihad », comme hier celui contre le terrorisme, fait que, de coups de menton virils en déclarations martiales, la cause est entendue : la patrie est en danger et les atermoiements ne sont plus de mise, même quand il s'agit des libertés publiques. Que les prises de position honteuses de certains à droite, comme celle du député UMP Alain Marsaud, qui invitait à « s’asseoir sur les libertés », ne viennent pas éclipser le fait qu’aujourd’hui encore la balance entre sécurité et libertés va dans le même sens, déséquilibrée qu’elle est vers toujours plus de diminution des droits. Développement sans fin d’un arsenal répressif déjà très lourd, création d’une nouvelle infraction de l’intention, création de pouvoirs exorbitants de l’administration sur les citoyens, leurs déplacements, leur expression, notamment sur le Net, détricotage du droit de la presse, accroissement des pouvoirs de police et de la justice dans des domaines allant bien au-delà du terrorisme : autant de dévoiements de notre droit, que la lutte contre le terrorisme ne saurait légitimer.

L’argument est d’autant plus efficace que la situation internationale est extrêmement dangereuse. A l’engagement militaire sur un théâtre extérieur correspond une relativisation des libertés fondamentales pour tenter de dominer l’incertitude de la période, ce qui suffirait à dévaloriser, voire annihiler la critique.

C’est ainsi que dans la loi antiterroriste, ses motifs n’ont que la peur comme conseillère. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) tout comme la Commission numérique de l'Assemblée nationale et le Conseil national du numérique se sont d'ailleurs montrés, dans leurs avis,  extrêmement critiques sur son contenu. Mais il en adviendra de ce texte comme d'autres : le gouvernement ni ne consulte ni ne sollicite un avis, dont il avait bien pressenti qu’il mettrait à jour l’illégitimité et l’inefficacité de telles atteintes aux droits et libertés.

Au rebours de cette courte vue, l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN) considère que l’expérience de ces lois appliquées dans le monde (en particulier aux États-Unis, qui s’en sont faits le parangon avec le Patriot Act), montre que celui-ci n’est pas devenu plus sûr avec ces méthodes. A moins d’être aveugle, il faut bien constater que le terrorisme ne faiblit pas quand tombent les libertés publiques. Dans les pays mêmes qui pratiquent à un degré ou à un autre la suspension des libertés dans ce cadre, les effets sont médiocres voire contre-productifs.

C’est à l'audition d'une multiplicité de points de vue, constitutionnel, juridique, politique, social, qu'il eût fallu procéder. Mais le débat n’a pas eu lieu puisque les initiateurs de la loi, telle qu'elle est, disent qu’il n’y a pas d’autre politique possible. Les questions ne seront donc pas posées. C’est ce à quoi les organisations qui composent l’OLN ne peuvent pas se résoudre. L'OLN appelle les sénateurs à tenir le débat, et, s’ils ne refusent pas d’adopter la loi, à tout le moins à proposer des amendements propres à apporter des garanties. Il appelle enfin les parlementaires à utiliser en tout état de cause leur possibilité de soumettre la loi au Conseil constitutionnel. »
Communiqué de l'Observatoire des libertés et du numérique : Cecil, Creis-Terminal, LDH, Quadrature du Net, Saf, SM.

Nicolas Sarkozy prépare-t-il un 18 Brumaire interne à l'UMP ?

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Nicolas Sarkozy prépare-t-il un 18 Brumaire interne à l'UMP ? La question se pose. Même s’il accepte, du bout des lèvres, une primaire à droite pour départager les candidats de ce camp à la prochaine élection présidentielle, gageons qu’il fera tout pour l’éviter. Ne cherchons pas ailleurs la candidature précoce (trop ?) d’Alain Juppé et celle non moins répétée de François Fillon. On sait ce que pense Nicolas Sarkozy de la primaire à droite : « Regardez les socialistes, déclare-t-il avec un sourire en coin, ils ont leur choisi leur candidat après une primaire. On voit le résultat. »
En fait de résultat, il lui faudra attendre encore 30 mois avant de le connaître avec plus de précision que le doigt mouillé et que ses certitudes dont on sait ce qu’elles valent. Cerné par les affaires, les membres de sa secte dénoncent même un « acharnement » des juges, Nicolas Sarkozy alias Paul Bismuth étant mêlé de près ou de moins près à un tas d’affaires aussi différentes que l’affaire Karachi, l’arbitrage Tapie, le scandale Bygmalion, les sondages de l’Elysée, et maintenant les éventuelles retro commissions versées dans le cadre d’une vente d’hélicoptères à un pays fort peu démocratique du nom de Kazakhstan dans lequel le président n’organise pas d’élections. Ainsi est-il plus facile de conserver le pouvoir.
Ces affaires judiciaires vont forcément durer dans le temps. Dans le temps long. Il est bien évident que l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République lui permettrait d’échapper aux jugements des cours dans la mesure où il recouvrerait une immunité pour cinq années. Cette immunité, il fera tout ce qui en son pouvoir pour l’obtenir. Cela passe par une désignation à la candidature d'une élection qui, s’il affrontait Marine Le Pen au second tour, serait pour lui une promenade de santé. Il manquerait de nombreuses voix à gauche mais Sarkozy l’emporterait.
Comment être sûr d’être le candidat de la droite ? Il n’y a pas cinquante manières. Il suffit de s’emparer de l’UMP — ce qui sera fait fin novembre — de modifier les statuts du nouveau parti qu’il projette avec l’accord des militants favorables à 80 % à Sarkozy et de renvoyer à Bordeaux et à Laval (ou Paris) les deux anciens premiers ministres dont l’un fut son « collaborateur » et l’autre son ministre des affaires étrangères.
Il s’agirait alors d’un 18 brumaire nouveau genre et d’une prise de pouvoir à la hussarde, manière qu’affectionne particulièrement les grognards genre Hortefeux ou Césari.
(1) Le coup d'État du 18 brumaire An VIII (9 novembre 1799) de Napoléon Bonaparte marque la fin du Directoire et de la Révolution française et le début du Consulat.

Comment l'industrie du tabac fait pression sur les députés européens en pratiquant l'art du « copier-coller »

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Tous les députés européens (hommes et femmes) sont épiés, surveillés, fichés par le lobby des fabricants de tabac. L’émission Cash investigation, sur France 2 hier soir, nous a décrit un paysage bruxellois ravagé par ces commerciaux redoutables prêts à tout pour empêcher le vote de directives gênantes pour la vente de cigarettes, de cigares et autres tabac en vrac dans l’Union européenne.
Elise Lucet et son équipe d’enquêteurs ont réussi à se procurer un recueil de 600 pages rédigées par le groupe Philip Morris et contenant tous les objectifs, les moyens, les techniques de l’immense entreprise américaine ainsi que le fichier des députés assorti de commentaires plus ou moins agréables en fonction des votes et des déclarations publiques des honorables élus.
L’attitude des député(e)s ne dépend d’ailleurs pas de leur étiquette. Il se trouve — est-ce un hasard ou la loi du nombre — que les députés les plus directs et les plus favorables à Philip Morris se recrutent à l’UMP. Le député Franco, ex-député français, est même une caricature. Il explique simplement, sans mesurer réellement l’aberration de ses propos, qu’il propose au vote de ses collègues des amendements rédigés par les industriels du tabac car cela lui fait gagner du temps après qu’il a constaté, grosso modo, qu’il était d’accord avec le contenu. Un autre ex-député UMP, M. Aubry, a oublié qu’il avait proposé des copiés-collés des amendements des mêmes industriels sous prétexte qu’il est contre toutes les interdictions. Il raconte que rien ne peut empêcher un être humain qui veut passer à l’acte de le faire. Si quelqu’un veut fumer qu’il fume. S’il court de risque de mourir d’un cancer ou d’un infarctus, c’est son problème. Quand l’intervieweur lui parle de santé publique et du devoir d’un élu de défendre l’intérêt général et la prévention et non l’intérêt de l’industrie du tabac, il botte en touche…
Mieux même, lors de l’interview d’un responsable de Philip Morris, l’homme emploie 28 fois le mot de maladroit : « Je ne nie pas que ce commentaire soit maladroit ». Il s’agit d’une remarque « maladroite. » Le tout à l’avenant. On n’est pas étonné d’apprendre que certains (qui ?) avancent l’idée qu’inciter les gens à fumer permet d’économiser sur le versement des retraites puisqu’un fumeur sur deux mourra autour de 60-65 ans ! Quel cynisme.
Le lobby du tabac n’est qu’un lobby parmi d’autres. Les députés Franco et Aubry justifient la présence de ces professionnels au Parlement européen au nom de l’information : « nous sommes mieux informés après les avoir rencontrés qu’avant. » Le reportage ne dit pas — peur d’un procès ? — quel intérêt personnel (s’ils en ont un) ont les députés favorables aux marchands d’un produit sur lequel il est écrit : « fumer tue. » Il n’empêche que l’adoption d’une directive sur les paquets dits neutres a été rejetée grâce aux amendements des députés de…Philip Morris ?

6 octobre 2014

L'accident de Jules Bianchi : le but n'est pourtant pas de mourir au volant


Jules Bianchi.
Comme tout un chacun je compatis à l’état de Jules Bianchi après le très grave accident de formule 1 dont il a été victime sur le circuit japonais de Suzuka. Les circonstances de l’accident ne sont pas encore très bien connues puisque les images ont été interdites de diffusion au public mais il est clair que la formule 1 du jeune pilote français a percuté un engin de levage présent en bord de piste pour procéder à l’évacuation d’une autre automobile accidentée.
Depuis des années les organisateurs des grands prix de Formule 1 obligent les constructeurs à améliorer sans cesse les organes de sécurité des véhicules afin que les pilotes se sortent le mieux (ou le moins mal) possible des accidents inévitables quand on pilote des bolides à 300 km/heure. On en est arrivé à un point tel que tout accident semble entraîner des conséquences improbables voire impossibles. Et inadmissibles.
C’est le cas pour l’accident de Jules Bianchi. Nombre de commentateurs considèrent que le typhon présent près des cotes du Japon durant le week-end avec vents violents et pluies incessantes aurait dû aboutir à une suppression pure et simple de la course. D’autres, parmi les pilotes, estiment qu’ils sont responsables de la conduite de leur engin et que c’est à eux de s’adapter aux conditions de course même dantesques.
Henri Pescarolo, ancien pilote, assure que le risque zéro n’existe pas et que le sport automobile eu égard aux puissances des moteurs et aux vitesses atteintes est réservé à des hommes (et des femmes) aux qualités physiques et mentales évidemment exceptionnelles. Mais comme dans tout geste sportif, l’impondérable demeure présent. La faute humaine d’un pilote, l’erreur d’un dépanneur, le manque de réactivité du directeur de course, les pneus non adaptés aux conditions climatiques…autant de causes pouvant aboutir à l’irréparable. Le but n’est pourtant pas de mourir au volant ou de devenir infirme à vie. Le but est de se dépasser soi-même, comme un alpiniste meurt dans une avalanche, au nom de la passion exacerbée d’un sport ou d’une pratique sportive.
J’ignore si, comme on l’affirme parfois, les recherches effectuées sur les formules 1 peuvent être utilisées pour améliorer les véhicules de tout un chacun. Un fait demeure évident : le principe de précaution ne peut être invoqué quand 22 bolides s’élancent sur un circuit de 3 ou 4 kilomètres. Les pilotes ont conscience des risques qu’ils courent, il les accepte tout en faisant tout ce qu’ils peuvent pour sortir indemnes des bavures gravissimes.

5 octobre 2014

Quelques réflexions au débotté : De la Manif pour tous à l'affaire Bygmalion en passant par les élections cantonales…


Alors que la France de la manif dite pour tous (en réalité pour quelques-uns) bat le pavé à Paris, rassemblant cathos intégristes et réacs de tous poils, un sondage conforte une large majorité des Français en faveur de la loi sur le mariage pour tous et une majorité se dégage également en faveur des familles homoparentales considérées comme des familles à part entière. Que les couples homos soient hommes ou femmes, les Français admettent l’existence de ces familles devenues des familles comme les autres.
Quel avancement, quel pas franchi allègrement en quelques années ! Quand on pense aux inepties sorties par des parlementaires normalement intelligents lors du débat sur le mariage pour tous, quand on se souvient des débats sur le PACS et sur les dangers encourus par notre société tout entière, que de fadaises et que de bêtises n’a-t-on pas entendu ? Les avis sont actuellement plus nuancés sur la GPA (interdite en France) et sur la PMA notamment pour les couples homosexuels. Là encore, la pédagogie évoluera et les droits seront modifiés. Il faut du temps, des explications, des justifications pour modifier le droit de la famille, l’un des signaux les plus marquants pour les religions monothéistes, celles qui ont contribué depuis des siècles à façonner notre mode de vie et notre façon de penser.

Karl Lagerfeld, le grand couturier Chanel, aime sa chatte. Il en a bien le droit. La plupart de ceux et celles qui ont des animaux domestiques en ont fait des animaux de compagnie voire des sujets d’accompagnement. La chatte de Karl Lagerfeld a des talents cachés. Non seulement on lui offre des rivières de diamant mais en plus elle reçoit des lettres en réponse à celles qu’elle envoie.
Ainsi, Brigitte Bardot lui a-t-elle envoyé un petit mot gentil, élégant même, comme elle le fait pour Marine Le Pen, par exemple, qu’elle soutient de son poids marketing encore trop lourd. La responsable du Front national n’hésite pas à se réclamer du soutien de l’ancienne icône cinématographique, un soutien essentiellement motivé par une islamophobie née de l’abattage rituel des moutons lors de l’aïd el kebir. Les yeux de la chatte de Karl Lagerfeld ou les fesses de Brigitte Bardot dans le Mépris de Jean-Luc Godard ? Voilà un choix cornélien. Peut-être BB m’adressera-t-elle un commentaire pour défendre les BB phoques, les baleines, les chiens errants et les taureaux de corrida. Je sais bien que « plus on connaît les hommes, plus on aime son chien » mais plus je connais Marine Le Pen moins j’aime BB.


Peut-être cela vous a-t-il échappé mais au mois de mars prochain auront lieu les élections cantonales dans la France entière : métropole et Outre-mer. Il s’agira, non pas d’élire des cantonniers, mais des conseillers généraux dans des cantons redécoupés et pour des candidat(e)s fonctionnant en tandem.
Cantons ruraux, cantons urbains voués à la disparition, futures compétences encore indéfinies (actuellement c’est le social, les collèges, les routes) on ne sait pas très bien quel sort le gouvernement et ensuite le parlement vont réserver aux futures assemblées départementales. Le département de l’Eure peut-il être considéré comme un départemental rural ou urbain ? Pour la Seine-Maritime, le choix semble simple avec la métropole rouennaise mais pour l’Eure, quid de son avenir ?
Si les Français demeurent dans les dispositions actuelles, je ne donne pas cher de la peau de nombre de camarades socialistes même si la plupart d’entre eux (et elles) ont accompli un travail considérable sous la houlette d’un Jean-Louis Destans (devenu député) co-auteur de nombreux projets devenus réalités. Jamais, on le sait, les électeurs ne font leur choix sur un bilan. Ils préfèrent l’air du temps et c’est ainsi que les vagues bleues (ou roses parfois) rythment les différentes consultations. C’est grave docteur ?

Au risque de lasser, je ne peux pas ne pas revenir sur le dossier Bygmalion. Il s’épaissit chaque jour avec les auditions et les mises en examen des grandes et petites mains de la société de communication et des responsables administratifs de l’UMP. Le JDD d’aujourd’hui nous apprend même que les comptes de l’UMP des années 2011-2012 seraient sujets à caution.
Ils sont donc six (pour l’instant) à qui on reproche un abus de confiance et un usage de faux pour les gens de l’UMP et une conception et un usage de faux pour ceux de Bygmalion. Si Nicolas Sarkozy n’a entendu parler de Bygmalion que bien après le second tour de l’élection présidentielle, il n’en est pas de même pour Alain Juppé, François Fillon, Bruno Le Maire qui tous en chœur se souviennent très bien des liens tissés entre l’UMP (à tous les niveaux) et MM. Alvès et Millot.
Comme dirait Me Maisonneuve, avocat de Bygmalion, le problème avec les politiques, c’est le trou de mémoire. Le grand blanc. Les juges posent des questions précises mais les politiques ne se souviennent pas. Avec les preuves sous les yeux (agendas, témoignages…) ils sont comme Bernard Tapie : amnésiques. J’ignorais que la maladie d’Alzheimer frappait plus tôt et plus souvent chez les politiques que dans la population ordinaire.

Des djihadistes repentis de retour d’Irak ou de Syrie révèlent que leurs mentors leur demandent de commettre des attentats en France. Manuel Valls ne cache pas que le risque est grand de revivre les très éprouvants moments de 1995. On peut comprendre que le gouvernement demande une vigilance redoublée aux policiers et aux gendarmes ainsi qu’aux citoyens. Mais franchement que peut le Français moyen face aux dérives suicidaires de fanatiques formés (ou plutôt déformés) pour tuer à l’aveugle des innocents absolus. Les Mérah, Memouche et compagnie pourront-ils ne plus passer au travers des mailles du filet tendu par les services de protection des populations ?
Le danger est de tout confondre. Je suis heureux de citer Edwy Plenel qui dans son dernier livre « Pour les musulmans » écrit : «Ce monde si fragile et si incertain dont les divinités secrètes se nomment la beauté et la bonté. C’est en leur nom qu’il faut dire non à l’ombre qui approche, par la solidarité concrète avec ceux et celles qu’elle menace. Au premier chef desquels nos compatriotes d’origine, de culture ou de croyance musulmanes. »