28 août 2014

Christine Lagarde mise en examen pour « négligence » dans l'affaire de l'arbitrage Tapie


Christine Lagarde, directrice générale du FMI, à la tête d’une institution importante pour la stabilité financière des états, a été mise en examen, hier, par la chambre d’instruction de la Cour de justice de la République. Après quatre auditions de plusieurs heures s’échelonnant sur plusieurs semaines, les magistrats professionnels issus de la Cour de Cassation, de la Cour des Comptes, notamment, sont arrivés à la conclusion que Mme Lagarde s’était montrée « négligente » dans l’affaire de l’arbitrage dont a bénéficié Bernard Tapie.
L’ancien homme d’affaires (dans tous les sens du terme) ancien ministre de François Mitterrand, ancien président de l’OM, ancien soutien de Nicolas Sarkozy, ancien taulard pour match truqué, devenu patron de presse, s’est vu attribuer par un collège privé d’arbitres (1) une somme d’argent supérieure à 400 millions d’euros dans l’affaire de la revente d’Adidas au Crédit Lyonnais. L’arbitrage, très utilisé dans les affaires privées, l’est plus rarement quand il s’agit d’argent public.
Il s’agit d’une pratique ancienne, dont Christine Lagarde, ex-responsable d’un grand cabinet d’avocats américain, en connaissait les avantages mais peut-être moins les inconvénients. Les magistrats instructeurs lui reprochent essentiellement de ne pas avoir contesté la décision des arbitres visant à attribuer à Bernard Tapie la somme rondelette déjà citée et surtout de l’avoir fait bénéficier d’un préjudice moral de plus de 40 millions d’euros, somme extravagante aux yeux des experts et bons connaisseurs du dossier.
J’avoue que le terme de « négligence » prête à confusion. Il peut, en effet, s’agir d’une peccadille, d’une absence d’action ou, au sens juridique du terme, d’un acte non accompli alors que tout penchait pour sa réalisation. Il s'agirait en quelque sorte d'une faute professionnelle. Mais si Mme Lagarde n’a pas contesté l’arbitrage dans les délais impartis, c’est tout simplement parce qu’elle a obéi à Nicolas Sarkozy lequel voulait clore le dossier Tapie-Crédit Lyonnais à l’avantage de celui qui avait appelé à voter pour lui…mais sur le dos des contribuables français.
Dans l’affaire Tapie, d’autres intervenants, non ministres, seront comptables de leur comportement devant la justice ordinaire. Mme Lagarde bénéficie, elle, d’un privilège de juridiction comme ancienne ministre et la sanction qu’elle encourt (un an de prison, 15 000 euros d’amende) ne lui sera évidemment jamais opposée puisque les juges de la Cour de justice de la République sont majoritairement des parlementaires et qu’une solidarité non écrite jouera en sa faveur si, un jour, procès il y a.
En attendant, Mme Lagarde continue d’occuper sa fonction à Washington, où le conseil d’administration du FMI ne tardera pas à lui renouveler sa confiance.
(1) les arbitres : Pierre Estoup, Pierre Mazeaux, Jean-Denis Bredin. Pierre Estoup semble être l’auteur de la sentence arbitrale.

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