7 février 2014

Affaire Karachi : Nicolas Sarkozy parviendra-t-il à passer entre les gouttes ? Vous le saurez en lisant les prochains épisodes d'un feuilleton passionnant

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Les juges d’instruction chargés de l’affaire Karachi renvoient Edouard Balladur et François Léotard devant la Cour de Justice de la République (1). Les ministres mis en cause dans l’exercice de leurs fonctions ne peuvent être jugés par la justice ordinaire. Ils sont jugés par des magistrats professionnels et surtout par leurs pairs, parlementaires comme Balladur et Léotard l’ont été. Soyons clairs : si les juges renvoient les deux anciens ministres devant la CJR c’est qu’ils ont accumulé des indices graves OU concordants (et non ET concordants) comme l’écrivent souvent quelques journalistes mal informés. Autrement dit, les indices peuvent être graves sans être concordants et ils peuvent être concordants sans être graves. La nuance est de taille. 
Et comme les juges sont prudents — on l’a vu à Bordeaux dans l’affaire Bettencourt — Ils proposent que Nicolas Sarkozy (encore lui) soit également entendu par la CJR (il était ministre du budget à l’époque) sous le statut de témoin assisté. Ce qui veut dire que des indices peuvent être retenus contre lui mais ils ne sont, en l’état actuel des investigations, ni graves, ni concordants. Ce qui ne veut pas dire qu’il passera entre les gouttes pour la nième fois…surtout le jour où on apprend par le site Médiapart, décidément indispensable à la bonne information du public, qu’un livre écrit par le premier Premier ministre de la Libye libérée de Kadhafi, affirme que Nicolas Sarkozy a bien touché des millions pour financer sa campagne électorale de 2007, le dernier versement aurait eu lieu en 2009. On sait également maintenant que le témoin versé au dossier de plainte de Sarkozy contre Médiapart est un farfelu de première et que son témoignage finira sans doute dans la poubelle des fausses nouvelles.
Voilà donc un feuilleton qu’on avait laissé sur une page blanche, il y a quelques semaines, qui repart avec à la base un nouvel épisode judiciaire intéressant : les campagnes présidentielles de Balladur et de Sarkozy avec leurs comptes de campagne approuvés dans des conditions abracadabrantesques pour « doudou » (2) et sans doute insincère pour Sarkozy. En 2012 les comptes de ce dernier ont été rejetés pour un coupable laisser aller (pour le moins) dans la présentation du financement d’un meeting présidentiel ou plutôt un meeting de candidat.
Les journalistes de Médiapart dont le directeur Edwy Plenel a appris avec ravissement que les députés avaient voté une TVA à 2,1 % pour les entreprises numériques (au lieu de 19,6% puis 20 %) à l’identique des entreprises de presse papier, sont sur les dents. Ils vont suivre, pour nous, les nouvelles phases des enquêtes devant la CJR dont les instructeurs sont des magistrats aguerris. Je promets de raconter le déroulement du film à tous ceux qui ne seraient pas encore abonnés à Médiapart.
(1)  L’affaire Karachi : commissions, retro commissions en liaison avec le Pakistan et attentat contre le personnel de la Direction générale de l’armement faisant plusieurs morts. Les familles veulent connaître la vérité.
(2)  Avant le 2e tour de la campagne présidentielle de 1995, Edouard Balladur a versé 10 millions de francs en espèces sur ses comptes de campagne. Roland Dumas, président du conseil constitutionnel a approuvé les comptes contre l’avis des experts du Conseil et contre l’avis de certains membres.

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