29 juin 2013

Pourquoi tant de zones d'ombre ? Le contrat de la CASE avec Véolia nécessite une étude approfondie


MM. Yung et Martin avaient verrouillé le vote en effrayant les délégués. (photo JCH)
L’association pour la protection et l’amélioration de l’environnement et le retour des DSP en régie publique s’est adressée solennellement aux délégués de la Communauté d’agglomération Seine-Eure. Malheureusement, seule une poignée d’élus a compris l’importance de l’engagement pourtant voté à la majorité. Il eût été de bonne gestion de différer le vote d'une délibération qui laisse l'eau et l'assainissement dans les mains de Véolia pour bien des années encore.

Au rythme actuel  il faudra 365 années pour amortir le premier versement de Véolia à la ville de Louviers ! (droits d’entrée versés en 1989) !

925 années pour amortir le second !

158 années pour amortir l’usine des Hauts-Prés !

355 années pour amortir un des contrats passés avec Val-de-Reuil !

Cela ressort de l’examen de la gestion de Véolia dans le cadre de la convention liant l’opérateur privé et la CASE. Un bilan aussi surprenant qu’exceptionnel puisque le directeur départemental des finances publiques considère que la méthode de calcul du groupe privé ne correspond aucunement à la réalité économique. Pourquoi ?

Nous ne sommes pas surpris de cette gestion abracadabrantesque. Le résultat, désolant, fait que si la CASE appliquait l’arrêt Olivet en 2015, il lui faudrait théoriquement verser une indemnité compensatoire de près de 9 millions d’euros à l’opérateur privé, au titre des investissements non amortis par Véolia. C’est là le principal argument qu’utilise l’exécutif actuel pour rejeter l’application de l’arrêt Olivet, refuser de mettre fin à la DSP (délégation de service public) et d’engager le retour de l’eau en régie publique en 2015.

Tout cela est le fruit d’une stratégie savamment élaborée. Comme les responsables de la CASE ne veulent pas revenir en régie, ils multiplient les obstacles et s’appuient sur des arguments très discutables. Le principal consistant à faire peur aux délégués en majorant de manière déraisonnable le préjudice éventuel d'une rupture de contrat en 2015.

Les délégués de la CASE ont en effet été invités à prolonger le contrat liant Veolia et Seine-Eure jusqu’en 2017 et 2021. De quels éléments disposaient-ils pour juger du bien fondé de cette demande ? L’avis consultatif du directeur départemental des Finances publique ne suffisait pas puisqu’il n’était que consultatif. Ce dernier s’appuyait sur une synthèse élaborée par un bureau d’études — Calia Conseil — que les responsables de la CASE refusent de rendre public bien qu’aucun secret commercial ne soit nécessaire puisque l’opérateur ne change pas. Nous avons décidé de saisir la CADA (commission d’accès aux documents administratifs) pour que l’examen des pièces et des comptes soit réellement contradictoire.

Les élus ont voté pour la reconduction du contrat d’affermage, jeudi dernier. 
Pourquoi ne pas attendre le renouvellement démocratique de 2014 pour confier aux futurs délégués le choix de la meilleure solution pour les usagers ?

Pourquoi ne pas attendre de posséder toutes les réponses aux questions légitimes que nous posons ?

Pourquoi ces amortissements surréalistes ? Pourquoi cette précipitation à engager la poursuite du contrat si longtemps ?

Pourquoi vouloir faire payer à tous les usagers de la CASE le remboursement de sommes considérables dont seule la ville de Louviers et Val-de-Reuil ont bénéficié (plus de 3,5 millions d’euros) ?

Pourquoi ignorer les ressources financières que procurerait le retour de l’eau en service public, comme nous en avons maints témoignages ?

Pourquoi craindre une mise en concurrence en 2015 — même avec un autre opérateur privé — pour respecter la lettre et l’esprit de l’arrêt du Conseil d’Etat ? Bien sûr la régie publique a notre préférence mais l'intérêt des usagers commande tout.

Que se passera-t-il en 2021 ? Quel sera, alors, le montant de l’indemnité compensatoire due à Véolia au rythme actuel des amortissements même si Véolia assure abandonner toute demande de compensation. Ce ne sont pas des philanthropes, les 9 millions qu’ils réclameraient pour rupture du contrat vont être payés quand, comment, sinon en augmentant le prix de l’eau ce qui démontrerait l’inanité du choix de la semaine dernière. Richard Jacquet, maire de Pont-de-l’Arche a posé la bonne question : quelle a été la rentabilité de la délégation de service public « eau et assainissement » ? On attend toujours la réponse.

Comme la délibération a été approuvée jeudi dernier, nous n’hésiterons pas, après avis de notre conseil, à ester en justice pour défendre les intérêts des usagers et exiger une étude complète et contradictoire entre gestion privée et gestion publique. Nous ne craignons pas le débat. Nous déplorons que l’exécutif actuel n’ait exercé aucun contrôle efficace sur les actes de l’opérateur privé. Nous refusons d’être les otages d’un groupe privé à la gestion si opaque. Comme dirait le président délégué : « des zones d’ombre subsistent depuis la signature des contrats d’origine. » A qui la faute ? Qui n'a pas fait son travail ? Nous devons savoir quelles sont ces zones d’ombre et pourquoi l’exécutif ne cherche pas à les éclairer ?

Il appartenait donc aux délégués de la CASE de demander du temps pour construire un dossier étayé, sans la crainte d’une augmentation du prix de l’eau avec la certitude de défendre l’intérêt général et le service public. L’eau est le bien de tous, ce n’est pas une marchandise. Nous comptions sur leur clairvoyance et leur sagesse. Nous avions tort.

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