16 février 2013

Trois femmes nommées au Conseil constitutionnel. Le président de la République tient ce qu'il promet


François Hollande à Louviers dans la salle du conseil municipal. (photo Jean-Charles Houel)
L’événement, car c’en est un, est passé presque totalement inaperçu. Et pourtant, la désignation de trois membres du Conseil constitutionnel est un acte essentiel dans notre vie démocratique puisque le Conseil, depuis 1958, joue un rôle non négligeable devenu, au fil des ans et des modifications de la constitution, un acteur majeur de la légalité et de la légitimité des lois. Depuis que les citoyens ont la possibilité de poser des questions (filtrées) de constitutionnalité, les sages sont saisis de dossiers volumineux. Ils font et refont les lois. Une forme de ripolinage au gré des jurisprudences diverses et des modifications adoptées par le Parlement réuni en Congrès.
Cela soulève d’ailleurs un problème : des personnes non élues peuvent décider de l’avenir et de l’application de textes votés à la majorité par le Parlement composé d’élus de la nation, ceux censés justement faire la loi. Cette république des juges fait l’objet de débats dans notre société après que la Cour des comptes a suggéré des mesures budgétaires et économiques relevant de choix politiques du gouvernement Ayrault. Plusieurs députés socialistes se sont élevés contre les prises de position de Didier Migaud, ancien président (socialiste) de la commission des finances de l'Assemblée nationale.
L’événement ? C’est le choix opéré par les trois présidents. François Hollande, président de la République, a choisi Nicole Maestracci, première présidente de la cour d'appel de Rouen, présidente de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars), presque 63 ans, proposée pour remplacer Pierre Steinmetz. Jean-Pierre Bel, président du Sénat, a désigné Nicole Belloubet, 57 ans, ancienne rectrice d'académie, professeure des universités et Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale a confirmé Claire Bazy-Malaurie, 64 ans, déjà membre depuis trois ans car nommée en remplacement d'un membre décédé. Elle était rapporteure générale à la Cour des comptes et avait été nommée en 2010 par Bernard Accoyer (UMP), alors président de l'Assemblée.
Ainsi, trois femmes ont été choisies par les trois plus hauts personnages de l’Etat pour veiller à la régularité des élections nationales et référendums, se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois et de certains règlements dont il est saisi. Ce choix n’est pas neutre. Il répond à une exigence de reconnaissance des compétences et des talents féminins. Il est conforme à l’engagement du Président de la République qui a fait de l’égalité et de la parité des objectifs concrets plus que de belles paroles.
Jean-Louis Debré, président jusqu’en 2016, va donc accueillir deux nouveaux membres connus pour leurs compétences et leur forte personnalité et un 3e qu'il connaît déjà. Sans préjuger des sensibilités politiques des uns et des autres, il est évident que le choix de deux femmes connues pour leur engagement à gauche contribuera à équilibrer un tant soit peu l'écrasante domination des membres désignés par la droite. Il serait simpliste voire offensant pour les sages d'imaginer que leur ancienne appartenance à l'UMP ou au PS serait susceptible d'influencer leur jugement. Pierre Joxe, dans un livre pas très ancien, rappelle tout de même comment il s'est rongé les ongles en écoutant certains membres du conseil traiter de certaines questions de société comme la récidive délinquante des jeunes par exemple. Devenu avocat, il consacre son temps et son énergie à défendre des mineurs et des jeunes poursuivis en correctionnel !
S’agissant du contrôle des élections, le conseil vient d’invalider deux députées socialistes (dans deux circonscriptions de l’étranger) dont les comptes de campagne ont été refusés. Les conséquences en sont terribles puisque les deux députées se voient frapper d’une inéligibilité d’un an ! Elles ne pourront donc pas se représenter lors des législatives partielles. La commission des comptes de campagne leur reproche d’avoir ouvert deux comptes alors que la loi en impose un seul. Mais comme l’a déclaré Philippe Mariani (UMP) « la difficulté provient du fait que dans ma circonscription de l’étranger, j’ai utilisé neuf monnaies différentes ! » Lui n’a pas été invalidé puisque ses comptes étaient conformes. Il serait bien que le législateur se penche sur cet aspect de la loi même si le Conseil constitutionnel aurait pu faire preuve de mansuétude à l’égard de deux élues parfaitement honnêtes mais victimes de la sévérité d’une loi imparfaite. Dura lex…

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