La réalité est très loin des images d’Epinal qui nous présentent le
« plan de sauvetage de la Grèce » comme un exercice d’équilibre entre
les sacrifices « consentis » par le peuple grec et les « sacrifices »
des banques. Les sacrifices ne sont nullement « consentis » par le
peuple grec qui multiplie grèves et manifestations.
Les « sacrifices »
des banques ne sont en rien des sacrifices. La Grèce est loin d’être
sortie d’affaire, au contraire. Quant à la crise de la dette publique
européenne elle resurgit maintenant sous d’autres formes, tout aussi
dangereuses.
Le « sacrifice » des banques
Les créanciers privés et les banques qui sont les principales
créancières privées de la Grèce se sont-ils « sacrifiés », comme le
proclament à grands renforts de violons plaintifs la quasi-totalité
des médias, en « effaçant » 53,5 % de leurs créances, c’est-à-dire 107
milliards d’euros ?
Il suffit pour répondre à cette question d’imaginer ce qui serait
advenu en cas d’impossibilité pour la Grèce de rembourser ses
créanciers. La Grèce n’aurait pas obtenu les 130 milliards d’euros
versés par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le FMI.
Elle n’aurait donc pas pu faire face au remboursement de ses
obligations arrivées à échéance (14,5 milliards d’euros à la fin du
mois de mars). La panique aurait gagné les marchés financiers et se
serait immédiatement étendue aux titres des dettes publiques
italiennes et espagnoles qui représentent un total de près de 3 000
milliards d’euros en grande partie détenus par les banques et les
assurances de l’Union européenne.
C’est donc pour sauver leurs créances de près de 3 000 milliards
d’euros et leur propre peau (une crise bancaire aurait immédiatement
suivi ce défaut grec), que les banques et les assurances européennes
ont accepté de « perdre » 106 milliards d’euros.
Ensuite, sur les 130 milliards soi-disant versés par le FESF et le
FMI pour « aider la Grèce », 25 milliards d’euros seront aussitôt
utilisés à recapitaliser les banques grecques et retourneront donc aux
banques. Ensuite, la valeur des obligations grecques n’avaient plus
rien à voir avec leur valeur d’émission. Une obligation de 100 euros
lors de son émission (sa valeur faciale) ne valait plus sur le marché
secondaire (la bourse) que 10 euros dans le meilleur des cas. Les
nouvelles obligations reçues par les banques et les assurances en
contrepartie de leurs anciennes obligations auront une valeur de
46,5 % de la valeur faciale des anciennes obligations. Soit une valeur
de 46,5 euros pour une obligation de 100 euros qui ne valait plus que
10 euros sur le marché boursier. Un cadeau, donc, de 36,5 euros par
obligation de 100 euro
s pour les banques !
Ensuite, les banques pourront faire jouer les assurances, les
fameux CDS (Credit Default Swap) qu’elles avaient prises sur la dette
publique grecque. Certes, d’autres banques devront cracher au bassinet
les 3,2 milliards d’euros concernés mais se sont essentiellement des
banques anglo-saxonnes, Morgan Stanley notamment.