6 décembre 2010

Plysorol à Lisieux, ou l’histoire d’un pillage organisé


« L’histoire de Plysorol à Lisieux est un cas d’école. C’est l’expression la plus aboutie, mais aussi la plus abjecte de ce qu’est la réalité du capitalisme sauvage. Cette idéologie libérale dont a fait son credo l’Union européenne, avec la concurrence libre et non faussée. Mais aussi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) que dirige un socialiste, M. Pascal Lamy, avec la généralisation des accords de libre échange. Cette concurrence sauvage et cette libre circulation des matières premières, des marchandises et des capitaux qu’ils s’acharnent à nous imposer, c’est la négation du respect des droits des salariés et du respect qui leur est dû en tant qu’hommes et femmes. C’est la fin d’un monde civilisé. C’est le retour à la barbarie.

Voici intégralement, ce qu’expliquaient les délégués du personnel à la délégation des partis politiques du Front de Gauche venus la semaine passée à leur rencontre. La preuve par l’exemple.

« On a été sous le drapeau chinois pendant dix-huit mois. Pendant ces dix-huit mois, on a été dépouillés. Au lieu de nous amener de la matière première qui vient du Gabon, ils l’ont directement emmenée en Chine. Ça fait que depuis dix-huit mois, on a tout perdu, tous nos clients, car on a été dans l’incapacité de produire quoi que ce soit. Et ce qu’on demande, maintenant, c’est que justement déjà, qu’on les fasse payer, ces chinois là. Ils ont abusé du chômage. On est passés en chômage partiel pendant des mois. Ils ont abusé de ces droits français qui sont normalement réservés aux entreprises en difficulté.

Qu’est-ce qu’on veut ? Eh bien, les Chinois avaient annoncé que, lors de la reprise, on aurait au moins trois ans d’assurés sans perte d’emploi. Au bout de dix-huit mois, nous avons perdu notre emploi. Nous exigeons au moins les dix-huit mois de salaire qui nous restent [ndt pour parvenir au terme de l’engagement qui avait été pris]. Nous exigeons aussi réparation du préjudice qu’on a eu, parce que je peux vous assurer que ça été très dur de travailler avec eux. Il y en a qui ont souffert de harcèlement moral.

Il faudrait tout de même que l’État prenne conscience qu’il faut protéger l’industrie française. Parce que c’est bien beau de faire venir des investisseurs étrangers, mais il faudrait peut-être voir les barrières qu’on pourrait mettre autour, pour justement que ça ne se passe pas comme cela.

Il faut tout de même savoir que, bien sûr, cela a été un choix du tribunal de commerce de mettre en place ce plan, mais il a été soutenu par l’État Et j’ai encore en tête les paroles d’Estrosi à Fontenay-le-Comte qui est une autre usine du groupe, parce que Plysorol, c’est Lisieux, Fontenay-le-Comte et Épernay. Estrosi qui, à Fontenay-le-Comte, déclarait que tous les emplois de Plysorol seraient sauvés. Cela, il y a à peine deux ans, et aujourd’hui, on voit le résultat. Et maintenant, il est parti. Mais on peut dire que l’État, depuis deux ans, nous a complètement laissés tomber.

On a déclenché le droit d’alerte presqu’aussitôt, dès le mois de septembre 2009, en comité central d’entreprise, pour dire que déjà, on avait de grosses inquiétudes, parce qu’ils ne payaient aucun fournisseur. Et qu’ils commençaient déjà à nous parler de chômage.

De tout l’argent qu’ils devaient amener, on n’a rien vu passer. Ils n’ont vécu que sur nos stocks pendant les dix-huit mois. Ils n’ont pas mis un kopek. Ils ont acheté en avril, et en juin, le directeur financier a déposé le bilan. Ils n’amenaient pas d’argent. Dès juin, on s’est aperçu que cela n’allait pas. On s’est permis d’envoyer des courriers à tous les élus du coin, à tous les partis, jusqu’à Caen, pour leur dire ce qui se passait dans notre entreprise. Et c’est vrai qu’on a écrit deux fois au président de la République. On n’a eu qu’une réponse, la première fois. La deuxième fois, on ne l’a pas eue.

De plus, non seulement le patron chinois Zhang nous a dévalisé notre matière première, mais il a aussi volé les salariés. Il a encaissé les parts de mutuelle retenues sur les salaires et il ne les a pas reversées. Il a pris les cotisations du CE ; Il nous doit 30.000 €. Je peux vous dire que ça porte préjudice pour les employés, parce que c’était le budget pour Noël. Il a pris aussi les chèques MCV. Les cotisations de chèques MCV, il s’est permis de les garder pour lui. C’est un autre préjudice pour le CE, parce qu’il a fallu qu’on comble le trou.

Le patron, c’est un groupe chinois qui est au Gabon. Il n’était uniquement intéressé que par la matière première et la forêt, sans laquelle on ne peut travailler. Le Chinois est parti en octobre, sur décision du tribunal de commerce ».

Voilà où en sont aujourd’hui les salariés de Plysorol à Lisieux. Des salariés appelant au secours un gouvernement qui est aux abonnés absents. Parlons d’eux et aidons-les afin que le silence n’achève pas de les condamner. »


Reynald Harlaut
Parti de Gauche
Avec l’aide de Ghislaine Pelletier pour la transcription des propos des délégués du personnel de Plysorol.

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