28 juillet 2008

Pierre Mendès France et les jeux de Berlin

A quelques jours du début des jeux olympiques de Pékin, le site SportVox sort un papier fort documenté et très intéressant sur les comportements des gouvernements et des élus quelques mois avant les jeux olympiques de Berlin en 1936.
On peut lire : « En France, la polémique sur les Jeux prend de l’envergure assez tardivement, du moins plusieurs mois après la controverse qui a cours outre-Atlantique. Elle prend forme au sein de trois secteurs particuliers de la société : le politique, le sportif et l’opinion publique, dont le révélateur prédominant est la presse.
Au niveau politique, la campagne contre la manifestation olympique est, dans un premier temps, le fait de l’opposition de gauche. Le 17 décembre 1935, le député socialiste Jean Longuet est le premier à faire entendre sa voix. Il propose devant l’Assemblée un amendement demandant la suppression de la subvention allouée à la participation de l’équipe nationale, ainsi que le refus de concourir dans la capitale du Reich. Son réquisitoire est virulent, mais il n’est finalement pas suivi par la Chambre. Pour autant, cette intervention lance indubitablement le débat au sein de l’hexagone. En mai 1936, la victoire électorale du Front Populaire pose à nouveau sur le devant de la scène la question de la participation. L’arrivée au pouvoir d’une coalition de gauche, fondamentalement opposée à l’hitlérisme, relance les espoirs des détracteurs des Jeux nazis. Pourtant, il apparaît que le gouvernement de Léon Blum est à la fois passif et indécis dans cette affaire, et adopte une position que l’on peut qualifier d’intermédiaire. Soucieux de préserver ses alliés, en particulier les communistes (qui mènent une campagne caustique contre les Jeux allemands et militent dans le même temps pour l’olympiade populaire de Barcelone), ainsi que ses ennemis de droite (qui ont entre leurs mains les clés du mouvement sportif et sont donc majoritairement en faveur de la participation), il propose un projet de loi, qui ressemble à un compromis de circonstance: « Le gouvernement n’a pas fait opposition à la participation de la France aux Jeux olympiques. Et il a autorisé notre pays à participer aux Jeux populaires de Barcelone. En conséquence, deux projets de loi seront déposés par ses soins sur le bureau de la Chambre, l’un demandant le vote d’un crédit d’un million pour les Jeux de Berlin, l’autre de six cent mille francs pour les Jeux de Barcelone».
Il semble que le Front Populaire souhaite contenter tout le monde, en permettant d’un côté au mouvement sportif français d’être présent en Allemagne, alors que dans le même temps les partisans des Jeux catalans se voient octroyer une aide financière (retranchée à la subvention initialement prévue pour Berlin) leur permettant de dépêcher une délégation en Espagne. Le débat parlementaire a lieu le 9 juillet, et prend la forme d’une joute de pure forme. Le gouvernement, représenté par le sous-secrétaire d’État aux loisirs et aux sports Léo Lagrange, reste hors de la polémique. Le député communiste Florimond Bonte défend les couleurs des opposants aux Jeux, auquel répond le radical François Piétri, qui milite pour le principe d’une décision prise au nom de l’apolitisme. Au final, les crédits sont votés sans surprise à une écrasante majorité, par 521 voix à 1. Seul un jeune élu radical, Pierre Mendès France, s’exprime contre. Les communistes, de leur côté, s’abstiennent, voulant éviter de voir la motion concernant les crédits barcelonais être bloquée. »

Un seul élu de l'Assemblée nationale a donc voté contre les crédits en faveur de la participation de la France aux jeux olympiques de Berlin : l'élu de la circonscription de Louviers, le jeune Pierre Mendès France. En 1936, ceux qui le voulaient avaient lu « Mein Kampf ». Dans les discours d'Hitler, la disparition, donc la destruction, des juifs d'Europe n'était pas cachée. On savait que l'Allemagne réarmait. On savait aussi que la dictature nazie ne laissait aucune place pour la contestation et l'existence de partis d'opposition. Il est remarquable que Pierre Mendès France ait assumé en solitaire une position digne que l'histoire future si proche et si douloureuse pour la France allait consacrer.

La Chine de 2008 n'est pas l'Allemagne de 1936. Il s'agit pourtant bien d'une dictature, sans démocratie représentative, sans opposition structurée puisque les opposants y sont arrêtés, jetés en prison, voire assassinés. Le CIO, en accordant les Jeux Olympiques 2008 à la Chine, a reconnu l'importance économique grandissante de ce pays. Se trouvera-t-il un Pierre Mendès France pour faire primer la morale sur l'économie et la soumission au marché ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Une toute autre façon de présenter les JO, qui ne sont pas réductible aux performances d'un moment.
Un souvenir, heureusement oublié, des JO de 36, le salut Olympique, si proche de la forme de salut alors en vigueur en Allemagne, et "inventé" à cette occasion par le comité Olympique présidé par Pierre de Coubertin .

F Dreyfus a dit…

Paul Greveillac dans son dernier livre « Phrase d’Armes » en fait référence p117
PMF est commissaires aux Finance à Alger et y rencontre le personnage central du livre René Bondoux, médaillé olympique en avocat, e,très autres.